L’Ă©nigme du Parrain

Un chef-d’Ɠuvre cinĂ©matographique ?
« Le Parrain » est souvent citĂ© comme l’un des grands chefs-d’Ɠuvre du cinĂ©ma et a mĂȘme Ă©tĂ© Ă©lu meilleur film de tous les temps par certains. Ok, admettons qu’il soit bien tournĂ©, qu’il ait une rĂ©alisation impeccable et un casting de rĂȘve. Mais est-ce suffisant pour mĂ©riter tant d’adoration de la part de nombreux connaisseurs ?

Les valeurs sombres glorifiées
Ce qui me gĂȘne, ce n’est pas tant le film lui-mĂȘme, mais la place qu’il occupe dans l’Ă©chelle du cinĂ©ma mondial. La mafia, une organisation basĂ©e sur la violence, l’intimidation, le meurtre est glorifiĂ©e ici. Qu’il y ait un intĂ©rĂȘt Ă  montrer cette rĂ©alitĂ©, je le conçois. Mais de lĂ  Ă  en faire une rĂ©fĂ©rence culturelle presque incontestable ? LĂ , je bloque.

L’incomprĂ©hensible contradiction
Le comble pour moi, c’est de voir des personnes qui, d’un cĂŽtĂ©, soutiennent des mouvements progressistes comme #MeToo et, de l’autre, placent « Le Parrain » sur un piĂ©destal. Ce film dĂ©peint l’homme en tant que figure dominante, emblĂ©matique d’idĂ©es machistes, de rapports de force et d’autres maux qui causent les conflits mondiaux. La reprĂ©sentation de la femme y est presque inexistante, souvent relĂ©guĂ©e au rĂŽle de simple monnaie d’Ă©change. Si ce film illustre fidĂšlement l’atmosphĂšre d’une Ă©poque passĂ©e, une question demeure : Coppola aurait-il pu choisir de mettre en lumiĂšre les vies des femmes? Bien qu’elles apparaissent en pĂ©riphĂ©rie du rĂ©cit masculin, elles avaient, du point de vue fĂ©minin, une existence Ă  part entiĂšre, riche et complexe. En choisissant la perspective d’un homme dominant et machiste, Coppola n’a-t-il pas perpĂ©tuĂ© les stĂ©rĂ©otypes de l’Ă©poque, surtout sachant que le film ne fut pas tournĂ© pendant la pĂ©riode qu’il dĂ©crit ?

Au-delà de la qualité artistique
Je ne remets pas en question la nĂ©cessitĂ© de traiter des sujets sombres au cinĂ©ma. Mais quand un film comme « Le Parrain » est Ă©rigĂ© en modĂšle par tant de personnes averties, je m’interroge. Pour moi, c’est plus qu’une simple histoire de mafia. C’est une glorification de ce qu’elle reprĂ©sente, et ça, ça ne passe pas.

Le Parrain : Une Influence Perceptible chez les Jeunes Moins Avertis

Mon expérience avec la jeunesse
Quand j’Ă©tais plus jeune, je me souviens avoir frĂ©quentĂ© toutes sortes de personnes. Des jeunes de diffĂ©rents horizons, des petits rebelles aux amateurs de cinĂ©ma en passant par ceux qui dealaient du shit au coin de la rue. Et une chose m’a toujours interpellĂ© : l’influence notable du « Parrain » sur certains d’entre eux.

L’identification Ă  Michael Corleone
Ce qui m’a le plus marquĂ©, c’est cette obsession pour Michael Corleone. Des gars que je connaissais, qui n’avaient rien Ă  voir avec l’univers des racailles ou de la mafia, voulaient s’identifier Ă  lui. Pour eux, ce personnage incarnait une sorte d’idĂ©al, une figure de proue Ă  laquelle ils voulaient s’identifier. Mais est-ce vraiment l’idĂ©al Ă  suivre ?

Une réalité romancée
Il semble que pour beaucoup de ces jeunes, « Le Parrain » ne soit pas seulement un film, mais presque une reprĂ©sentation romancĂ©e d’une rĂ©alitĂ© Ă  laquelle ils aspirent. Ce n’est pas la mise en scĂšne, la rĂ©alisation ou le jeu d’acteur qui les attirent, c’est cette vie de mafia, cette autoritĂ©, ce respect que tout le monde semble donner Ă  Michael Corleone. Et cela pose problĂšme.

L’impact d’un film : bien plus qu’un divertissement
Le cinĂ©ma a toujours eu le pouvoir de nous influencer, de façonner notre perception de la rĂ©alitĂ©. Mais quand un film comme « Le Parrain » devient presque une feuille de route pour certains, on ne peut que s’interroger sur son vĂ©ritable impact. Certains diront qu’il faut distinguer fiction et rĂ©alitĂ©, mais pour ces jeunes, la frontiĂšre semble parfois bien mince.

L’appel du danger
De plus, cette aspiration Ă  un mode de vie dangereux, Ă  une autoritĂ© basĂ©e sur la peur et la violence, est alarmante. Pourquoi vouloir imiter un mode de vie si sombre, si loin de nos valeurs actuelles ? C’est une question qui mĂ©rite rĂ©flexion.

ÉtrangetĂ© du Divertissement Humain


Lorsque j’en parle Ă  mon entourage, on me dit souvent : « C’est juste du divertissement ». Mais cela soulĂšve une interrogation profonde. Pourquoi un film comme « Le Parrain », avec ses reprĂ©sentations de l’homme en tant que figure dominante et de la femme comme monnaie d’Ă©change, est-il Ă©lu comme le meilleur film de tous les temps par tant de gens?

Psychanalytiquement parlant, cette attirance pourrait rĂ©sider dans nos dĂ©sirs refoulĂ©s. La psychologie sociale pourrait voir cela comme un moyen d’apprivoiser nos peurs. Les Ă©tudes de genre rĂ©vĂšlent le renforcement des idĂ©ologies dominantes. L’histoire et la sociologie rappellent que l’art reflĂšte souvent son Ă©poque et les dynamiques sociales en jeu. Enfin, d’un point de vue psychiatrique, on pourrait chercher des mĂ©canismes internes qui nous poussent vers de tels rĂ©cits.

Cependant, malgrĂ© ces analyses possibles, une question demeure : comment notre sociĂ©tĂ©, avec toutes ses valeurs d’Ă©galitĂ©, d’Ă©quitĂ© et de respect, peut-elle glorifier « Le Parrain » au point de le consacrer comme le meilleur film de tous les temps? On peut comprendre qu’un tel film satisfait certains besoins psychologiques, mais pourquoi le porter aux nues, lui attribuant une telle distinction? Ce choix, loin d’ĂȘtre anodin, rĂ©vĂšle une contradiction troublante en nous. Comment l’ĂȘtre humain peut-il avoir autant de contradictions? Quelle ironie que d’Ă©lever un tel film, avec toutes ses complexitĂ©s et reprĂ©sentations problĂ©matiques, au rang de chef-d’Ɠuvre incontestĂ© ! Quel paradoxe Ă©trange et dĂ©routant de l’esprit humain!